Insan dénonce les atteintes aux libertés de mouvement des employées de maison migrantes

L'Orient le Jour

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Non Palestinian refugees and Migrants

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« La SG refuse de renouveler les permis de séjour des travailleuses domestiques qui ne vivent pas chez leur employeur », déplore l'association de défense des droits de l'homme.  

« Trapped » (piégée). C'est sous ce nom qu'a été publiée hier la nouvelle étude réalisée par l'association Insan sur les employées de maison migrantes au Liban. Une étude qui dénonce les violations des libertés de mouvement et de choix du lieu de résidence de quelque 250 000 travailleuses domestiques étrangères.

Une détérioration graduelle Si les employeurs sont encore et toujours montrés du doigt, car ils répriment de différentes manières la liberté de mouvement de la main-d'œuvre domestique (confiscation du passeport, enfermement à clé ou interdiction de sortie...), l'État, lui, demeure le grand responsable de cette situation de non-droit envers les employées de maison migrantes, qui « se détériore graduellement » depuis des décennies. Car le travail domestique n'est pas inclus dans le code du travail. Il n'est régi par aucune loi, mais par le système du garant (kafala), qui réglemente la présence de la main-d'œuvre étrangère au Liban. Une situation qui ouvre la voie aux « violations », non seulement de la part des employeurs, mais des bureaux de placement et des forces de l'ordre. Une employée de maison étrangère est ainsi « obligée » de vivre au domicile de son employeur, condition sine qua non du renouvellement de son permis de séjour. Ce permis sera « révoqué » au cas où elle enfreint ces règles mises en place par la Sûreté générale (SG), « même avec l'autorisation de son employeur et garant ».

« La privation de liberté est pourtant punie par le code pénal et peut s'appliquer aux cas d'enfermement forcé et de confiscation du passeport, martèle le fondateur d'Insan, Charles Nasrallah. Sans compter que la liberté de mouvement et la liberté de choix du lieu de résidence sont des droits humains reconnus par la Déclaration universelle des droits de l'homme et par le pacte international relatif aux droits civils et politiques, tous deux ratifiés par le Liban. »

C'est à l'université La Sagesse qu'a eu lieu le lancement de l'étude, à l'occasion de la Journée internationale des travailleurs domestiques et de la Journée internationale des réfugiés. L'événement a été marqué par la participation notamment de l'ambassadrice du Sri Lanka, Wijeratne Mendis, du représentant régional du Bureau du haut-commissaire aux Droits de l'homme, Abdel Salam Sidahmed, du représentant de l'université La Sagesse, Karim Mufti, de la journaliste de la LBC, Foutoun Raad, et des membres de l'association Insan. Également présents, le représentant du ministre de la Justice, le juge Samer Younès, la représentante du ministre du Travail, Denise Dahrouge, des membres de la société civile et des étudiants.

Le système du garant renforcé Comment ont donc été appliquées ces restrictions de liberté ? « Le système du sponsor a été renforcé au fil des années », explique Roula Hamati, d'Insan. La chercheuse rappelle comment, en 2014, « la SG a déporté des enfants de travailleuses migrantes nés au Liban, avec un ou deux de leurs parents ». Avec pour seule explication, une justification non officielle : « Les travailleurs migrants sont au Liban pour travailler et non pas pour fonder des familles. » Cette décision a été « momentanément interrompue », grâce aux pressions de l'association de défense des droits des employées de maison étrangères. Mais, en 2015, « la SG a refusé de renouveler » les permis de séjour d'une bonne douzaine de personnes qui ne résidaient pas avec leurs employeurs, « sous prétexte qu'elles ne travaillaient pas pour leurs garants ». Mme Hamati estime à ce propos qu'il s'agit d'une interprétation erronée de l'article 8 du contrat unifié. « Cet article demande aux employeurs d'assurer une résidence décente aux employées domestiques, mais il n'est nulle part mentionné que la résidence doit impérativement être au domicile de l'employeur », souligne-t-elle.

« Cette réalité touche 250 000 personnes. Et, pourtant, elle ne mobilise pas la société civile », déplore Abdel Salam Sidahmed. Le représentant onusien invite les autorités libanaises à adopter des textes de loi réglementant le travail domestique. « Les atteintes aux droits des employées de maison sont nombreuses », observe-t-il, évoquant les défis auxquels sont confrontées les autorités libanaises, liés non seulement aux restrictions de liberté, mais au repos hebdomadaire, au congé annuel, au temps hebdomadaire de travail, aux modalités de contrat... Il appelle aussi à « l'annulation du système du garant, instauré sans le moindre cadre légal ». « Pourquoi l'État libanais insiste-t-il à maintenir ce système au XXIe siècle ? » demande-t-il, invitant les autorités à adopter la Convention 189 sur les travailleuses et travailleurs domestiques, mise en place par l'Organisation internationale du travail (OIT).

À son tour, l'ambassadrice du Sri Lanka, Wijeratne Mendis, a énuméré davantage de problèmes auxquels sont confrontées les travailleuses domestiques sri lankaises, notamment les salaires bas, le changement d'employeur, les conditions de travail et d'hébergement... Elle a constaté de plus que « la moitié de ces femmes sont en situation irrégulière et ne peuvent donc pas bénéficier d'une assurance médicale ». Une situation qui « favorise toute forme d'abus », regrette-t-elle. « On évolue certes dans le discours », comme le constate le professeur Karim Mufti. En revanche, aucune évolution dans le quotidien des employées de maison. Entre la société civile et les autorités s'installe ce même et sempiternel dialogue de sourds sur le cadre légal réglementant la main-d'œuvre domestique et sur la nécessité « d'annuler » ou de « réformer » le système du garant.

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